Ivre d'images

Le rock ne serait rien sans ces pochettes de légende ancrées - parfois davantage que la musique associée - dans l’imaginaire collectif…

On rendait hommage il y a quelques mois à Storm Thorgerson(1), artiste rendu célèbre pour ses visuels d’albums rock parmi lesquels ceux de : Led Zeppelin (House of the Holy), Peter Gabriel (album éponyme), plus récemment Muse (Absolution),  mais surtout Pink Floyd pour qui il réalisa plusieurs pochettes.

Banane, bébé, Beatles

Une pratique courante dans le rock consiste à solliciter des artistes contemporains pour le visuel de ses albums (avec plus ou moins de réussite).  On pense à Sonic Youth pour ses albums Sonic Nurse et Daydream Nation illustrés respectivement de tableaux de Richard Prince et Gerhard Richter, mais aussi bien sûr à l’album Cheap Thrills de Big Brother and the Holding Company illustré par Robert Crumb, ou encore Vaughan Oliver pour le label anglais 4AD, avec des pochettes pour les groupes Pixies et The Breeders, entre autres.
Dans une société de la communication et de l’image, pas besoin de vous faire un dessin pour comprendre l’enjeu d’une cover réussie.
Après un rapide sondage, on retrouve toujours les mêmes sur le podium : la banane pop du Velvet Underground, les Beatles sur le passage clouté d’Abbey Road… La médaille de bronze est en revanche un peu plus disputée : le bébé nageur de Nirvana/Nevermind, la fameuse vache des Pink Floyd - photographiée par Storm Thorgerson pour l’album Atom Heart Mother -, les Doors et leur photo de famille pour L.A Woman, le moine qui s’immole de Rage Against the Machine, la langue tirée des Rolling Stones… Que des groupes internationalement connus me direz-vous ? Oui certes, mais ça ne fait pas tout !

Sergent Pepper's Lonely Hearts Club Band |The Beatles, par Peter Blake

Audace

Les pochettes d’albums de Michael RIP Jackson ne sont pas vraiment passées à la postérité (exception faite de Dangerous), celles de Radiohead, David Bowie, Björk, Queen, Stevie Wonder, Madonna, sont peut-être connues… des connaisseurs, mais n’ont pas à ce point marqué les esprits.
Le secret ? Des images fortes, de toute évidence… ce qui veut tout dire et ne rien dire. La réussite tient parfois à peu de choses : la tautologie du White Album, par exemple. Il fallait oser, les Beatles l’ont fait. Encore eux ? Eh oui, force est de reconnaître qu’il n’y a pas que leur  musique qui a impacté les mémoires. Le circus capharnaüm de Sergent Pepper Lonely Heart’s Club Band est aussi souvent cité parmi les pochettes mythiques de l’histoire du rock. Grand vainqueur ex aequo à ce petit jeu figure le groupe Pink Floyd. Outre la vache d’Atom Heart Mother déjà mentionnée,  font régulièrement leur apparition dans le top 10 le prisme de Dark Side of the Moon et le cochon gonflable flottant entre deux cheminées d’usine d’Animals - deux autres créations de Storm Thorgerson - mais aussi le mur de The Wall (ah tiens, une autre tautologie). Bref… des pochettes dont on ferait volontiers des T-shirts, des posters, des cartes postales, des badges, des fonds d’écrans, des mugs, etc.

Du 33 cm au timbre-poste

Quid des groupes plus récents ? Certes, on a jusque-là essentiellement évoqué des groupes ayant déjà quelques kilomètres au compteur de leur Tour Bus… et donc liés à des générations plus enclines que les digital natives à acheter des albums au format physique. Ceci n’est peut-être pas tout à fait anodin. Le cover design a connu ses heures de gloire entre les années cinquante et quatre-vingt, ce qui coïncide avec l’apogée du format vinyle, remplacé ensuite progressivement par le CD, puis (comme chacun le sait) par les formats dématérialisés, réduisant parallèlement la taille des pochettes d’album… à celle d’un timbre-poste. La philatélie n’étant pas notre sujet du jour, on en restera là pour cette chronique...

— Hannelore Guittet

1- Auteur avec Roger Dean de Album Cover Album, Harper Design, 160 pages, 2008.

Crédits photos :

Atom Heart Mother : Robert Wade CC BY-NC-SA 2.0

Sergent Pepper's Lonely Hearts Club Band : Paille CC BY-SA 2.0

Le 23 Décembre 2014 par Hannelore Guittet

Partager cette page